En France l’agriculture est un sujet éminemment politique.
Cela s’explique simplement : tous les Français ont un grand-père ou un arrière-grand-père agriculteur. Le lien à la terre garde quelque chose de sacré, même s’il a été perdu par la majorité de la population qui vit désormais dans de grandes agglomérations.
Cela explique peut-être pourquoi chaque année le salon de l’agriculture rencontre un immense succès avec plus de 650 000 visiteurs (1).
Les Français par ailleurs, savent que la plupart des agriculteurs ont des conditions de vie difficiles.
Mais la réalité est encore pire que ce que l’on imagine. De nombreux agriculteurs travaillent aujourd’hui à perte.
Ayant hérité de fermes de leurs parents, ils poursuivent l’activité agricole familiale par devoir ou passion. Mais souvent, ils ont un autre travail à côté.
Il paraît invraisemblable que l’activité professionnelle la plus essentielle à notre survie soit également l’une des moins rémunérées !
C’est pourtant le cas.
Cette terrible réalité a encore été rappelée dans un documentaire récent qui raconte l’histoire de Cyrille (1).
Face à la mer
Le film s’intitule “Cyrille, agriculteur, 30 ans, 20 vaches, du lait, du beurre, des dettes”.
Il a été réalisé par Rodolphe Marconi, jeune cinéaste qui s’est passionné pour l’histoire tragique du jeune agriculteur.
Ils se sont rencontrés au bord de la mer.
Rodolphe était en vacances. Tous les jours, il nageait. Tous les jours, il voyait sur la plage, un homme, assis, fixant la mer. Au bout de quelque temps, il va voir ce curieux personnage.
Il découvre Cyrille, agriculteur, venu voir la mer pour la première fois de sa vie. C’est la première fois qu’il prend le temps de faire une escapade.
Car la vie de Cyrille est entièrement consacrée à son travail. Il se lève à 6h, va voir ses 20 vaches avec son chien. Puis, il va au marché vendre son beurre. Ensuite, il gère sa ferme, notamment les arrivages de fourrage qu’il commande pour l’hiver, avant de s’occuper à nouveau de ses animaux. Sa journée s’achève vers minuit. Et c’est ainsi tous les jours de l’année, dimanche compris. Il n’a ni vacances, ni week-end.
Mais il a sa ferme, ses vaches, son beurre.
Au début tout allait bien
Certes, il ne pouvait pas se payer, mais les revenus de la ferme couvraient ses charges. Et il était chez lui, maître de son destin, ou à peu près.
Jusqu’à ce qu’un jour, l’administration lui demande de mettre sa ferme “aux normes”.
Il doit notamment construire un vaste hangar de 800 m2.
Le coût est évidemment faramineux.
Cyrille n’a pas les moyens de faire construire un tel édifice. Il doit emprunter.
D’homme libre, il devient esclave des banques.
Un coup du sort
Il parvient à rembourser les premières années de l’emprunt.
Mais une année, il perd 10 vaches.
Il ne s’en remet pas. La banqueroute menace.
Il ne paye plus l’emprunt. Viennent les huissiers qui repartent aussitôt : il n’y a rien à prendre.
C’est la liquidation. Rodolphe aide Cyrille à gagner un peu de temps. Le juge accorde 6 mois de plus.
Tristesse et gâchis
A ce jour, je ne sais pas qui a racheté la ferme, ni ce que Cyrille est devenu.
Cyrille, c’est un travailleur. Un homme intègre, volontaire. Je suis certain que d’une manière ou d’une autre, il aura réussi à retrouver du travail. Et Rodolphe l’a sûrement aidé.
Mais, c’est aussi l’histoire d’une ferme familiale qui s’achève, d’un savoir faire qui meurt et d’un homme, qui en dépit des services rendus à la communauté, s’est trouvé abandonné dans un moment difficile.
Et le problème est que la situation de Cyrille n’est pas isolée.
En France, de très nombreuses fermes comme celle de Cyrille sont menacées. Les éleveurs, en particulier, sont dans une situation désespérée.
Aux difficultés financières et administratives s’ajoute désormais une pression sociétale : les éleveurs sont considérés comme des assassins par certains végans.
Ces derniers ne connaissent rien ni à la campagne, ni à l’élevage, ni même à la santé !
Car il est très difficile de rester en bonne santé sans consommer de produits animaux du tout.
Cela ne veut pas dire qu’il faut manger de la viande à tous les repas, ni que les méthodes agricoles actuelles ou l’organisation des abattoirs ne sont pas à revoir…
Un système à changer
A l’évidence, le modèle agricole d’aujourd’hui est à bout de souffle.
L’ennui, c’est que faire évoluer l’agriculture prend du temps. Par ailleurs, de nombreux intérêts économiques sont en jeu.
L’agriculture d’aujourd’hui repose sur un système administratif complexe qui va des administrations régionales (safer et autres), aux institutions européennes qui gèrent la politique agricole commune.
Depuis 100 ans, l’agriculture est cadenassée par des règles, des administrations et un système économique qui maltraite et ostracise les agriculteurs.
C’est le catalogue officiel qui les oblige à choisir les espèces (3) qu’ils doivent planter. Ce sont les contrôles incessants, les directives de Bruxelles, les mises aux normes dispendieuses, la mainmise de l’agro-industrie et le pouvoir de la grande distribution etc.
Il n’existe aucune liberté dans le monde agricole d’aujourd’hui.
C’est un monde sclérosé, tenu par quelques administrations et quelques syndicats dans lesquels les individus ne peuvent exister.
Comment faire ?
Evidemment, si les changements étaient simples à mettre en œuvre, ils auraient déjà été réalisés.
Favoriser l’agriculture biologique et faire de l’agriculture française un label ultra qualitatif.
L’agriculture française a une bonne réputation dans le monde.
C’est en partie parce qu’ailleurs, dans les deux Amériques ou en Australie par exemple, les techniques agricoles sont parfois terrifiantes : utilisation massive de pesticides, élevage concentrationnaires, mécanisation à outrance, OGM, plantes mutées, etc.
Au Brésil, ont été développés des poulets géants de la taille d’une petite autruche (4), au Canada, ce sont des saumons mutés trois fois plus grands que les saumons sauvages…
En France, l’agrochimie n’a pas réussi à imposer ces folies.
Pour autant, l’utilisation des pesticides, par exemple, reste excessive : les vignerons en sont malades et les sols en meurent ! Le fourrage des bêtes en hiver est majoritairement importé des pays d’Amérique latine qui font du soja et du maïs OGM à outrance. Résultat, sans le savoir vous consommez régulièrement des OGMs…
Nous devons sortir de ce système en créant une agriculture ultra qualitative. Cela passe par
- des régions 100% bio ; imaginez que toute la Bourgogne deviennent bio : quelle publicité pour le bœuf charolais ou les vins de la région ! La première région à faire ce pari sera la grande gagnante évidemment.
- des labels “avec OGM” apposés sur tous les produits animaux ayant été nourris avec du fourrage mutant d’Amérique latine ;
- le développement de l’agroécologie, partout en France ;
- Une partie plus importante de la PAC devrait être consacrée aux services rendus par les agriculteurs en faveur de l’environnement : c’est la conservation des haies ou des tourbières pour la biodiversité, la constitution d’enclaves sauvages sans présence humaine pour laisser à la nature la possibilité de souffler et de se régénérer, la constitution de conservatoires, des pratiques agricoles respectueuses de sols, l’usage intelligent de l’eau, voire son filtrage, etc.
Tous ces services devraient être listés et rémunérés.
Les agriculteurs seraient les garants des écosystèmes, ce qui leur apporterait une reconnaissance et des revenus supplémentaires.
Ce que vivent les agriculteurs est inadmissible : attaques, vols et dégradation du matériel, agressions de toutes sortes, il est impossible de le tolérer plus longtemps ! Même si on est végan (ce qui pour moi est une aberration !) on n’a pas le droit de l’imposer aux autres ! Et cela ne justifie JAMAIS la violence de ces gens-là !! Qu’on les enferme s’ils ne respectent pas les autres !!
Notre trop grande dépendance aux importations alimentaires, (40%) nous met dans une situation critique d’autosuffisance sachant que la finance mondiale spécule ardemment sur ces ressources qui pourraient avoir comme conséquence, comme à chaque crise financière, une augmentation frauduleuse des prix ! La FNSEA, qui commence à comprendre que les traités de libre échange ( plus exactement « librement faussés » – les mots ont un sens) vont leur être préjudiciables, devraient se sentir concernés au premier chef et être les premiers à s’emparer de cette très bonne idée de produire du Lupin à la place du soja et maïs américain cocktail détonnant d’OGM et pesticides nocifs ! merci à Philippe Desbrosse d’avoir eu l’idée de développer cette légumineuse oubliée !
La solution passe par l augmentation des prix des produits payés aux agriculteurs, et arrêter de produire des normes absurdes de technocrates qui n ont jamais mis les pieds dans une ferme et seraient incapables d assurer le travail qu ils imposent. Stop aux produits sans gout plein de produits chimiques qui tuent nos agriculteurs et nous aussi
Vous vous rendez compte que si les français se mettaient à manger de la viande une fois par moi ce serait plus de la moitié des éleveur qui devraient arrêter ou exporter leur marchandise. Ca me dérange pas pour les animaux mais c’est juste que votre pétition qui prétend défendre les agriculteurs se contredit sur ce thème.
J’ai signé, bien que je trouve le discours sur les agriculteurs trop gnan-gnan, lénifiant et non généralisable à tous les agris, bien loin de là ; en effet, dans le texte de cette pétition, les agris ne sont que les pauvres victimes d’un méchant système qui les broie. On leur ôte toute responsabilité, toute. Or, n’oublions pas qu’ils FONT le système, qu’ils SONT le système : qu’ils arrêtent de le servir, et ce système s’effondre ! Les agris de la FNSEA et des Jeunes agriculteurs font un lobbying forcené (et parviennent à leurs fins) pour continuer à pulvériser des poisons, arracher des haies, bref, détruire la biodiversité au nom de la seule rentabilité. Ils manifestent contre l’interdiction des herbicides et néonicotinoïdes, contre les zones de non-traitement (5 à 10 m, quelle dérision…) et ont réussi à faire créer une cellule de gendarmerie (Démeter) par un gouvernement servile et complice de leurs intérêts, une cellule de gendarmerie censée déjouer jusqu’aux discours de dénigrement du monde agricole !!! Ces agris-là sont RESPONSABLES et ACTEURS de cette agriculture de mort qu’ils pratiquent et à laquelle ils ne veulent pas renoncer ! En plus, certains d’entre eux, tels les gros céréaliers qui produisent de la m… et détruisent toute forme de vie autour d’eux s’en tirent financièrement très bien avec les milliers d’euros qu’ils perçoivent de la PAC ! Pourquoi, depuis toutes ces décennies (au moins vingt ans) où l’on sait que cette agriculture est irrémédiablement mortifère, les agris de ces lobbies de la violence ne demandent-ils pas au gouvernement de les aider à sortir de ce modèle, à être accompagnés dans la transition, à être formés ? Pourquoi ? Au lieu de militer contre l’ « agribashing » et de se plaindre sans arrêt – de la détestation croissante et LEGITIME dont ils sont l’objet par exemple – ils feraient mieux de lutter contre les causes légitimes de l’agribashing (contre l’agriculture mondialisée), d’exiger des pouvoirs publics qu’on les aide à sortir de ce modèle sans avenir ! Au lieu de quoi, les agris de ces lobbies font tout pour que ce système qui a broyé la paysannerie, ravagé nos paysages, empoisonné ressources et écosystèmes, ils font tout pour que cela perdure !!! Alors pauvres victimes d’un méchant système, eux aussi ? Non, tous les agris ne sont pas des pauvres victimes, car beaucoup veulent le conserver, ce système qui détruit la vie, et dans ce sens, ceux-là méritent la détestation qu’on leur voue. Qu’ils changent d’agriculture en faisant pression sur le gouvernement pour être accompagnés financièrement et techniquement dans la transition, et la haine qu’on leur voue légitimement disparaîtra ! La cause de cette haine n’est pas dans le haineux, mais dans celui qui s’en rend responsable par ses pratiques haïssables ! Le monde agricole n’est pas plus homogène que les autres : il y a ceux qui ont une éthique et ceux qui s’en foutent comme de leur premier caleçon, il ne faut pas les mettre tous dans le même sac.
J’ai du mal à signer cette pétition alors que j’en approuve l’essentiel du contenu et de la motivation.
J’aurais préféré lire « non, non et non à la désespérance de trop, trop d’agriculteurs », » nous avons un devoir ancestral et plus que jamais d’actualité, d’estime et de solidarité avec les agriculteurs », « nous avons tous besoin que les agriculteurs reçoivent toutes notre attention et actions bienveillantes » etc… d’autres slogans seraient à trouver certainement mais pas avec des mots dont le sens est dévalué et qui me paraissent contre- productif.
J’ai ainsi beaucoup de mal avec « suicide collectif » et « haine » notamment…
Merci cependant de tout ce qui vous ferez qui pourra être utile pour cette famille professionnelle dont je partage beaucoup de moments de vie.
N’est-il pas un peu tard ? et n’est-ce pas vain ?
La population des agriculteurs, quasiment tous « esclaves », ne représente déjà plus qu’un petit effectif.
De plus dans les 3 ans, 1/3 des agriculteurs restants partiront à la retraite !
Il n’y a pas de jeunes pour les remplacer !
Je vous laisse imaginer ce qui va se passer !
Un bénévole de Terre de liens.
Vous n’avez pas parlé des forêts qui sont décimées et leur biodiversité qui disparaît au profit de plantations de résineux où rien ne peut survivre ni animaux sauvages, ni oiseaux, ni insectes.
Bonjour, j’ai signé, bien évidemment… Pourriez-vous dans ce même thème qu’est la protection de notre nature, évoquer les lignées régulières qui sont opérées quotidiennement dans le ciel ? J’observe, et d’un ciel bleu magnifique, nous passons à un ciel laiteux.. Après quadrillage du ciel. Voudrait-on nous priver de soleil ? Merci d’agir en ce sens.