Il y a quelques jours j’ai lu un article de presse évoquant les négociations portant sur l’énergie en Europe entre l’Allemagne, la France et l’Espagne. (1)
J’ai appris que ces discussions étaient sous haute tension.
Je n’ai pas pu m’empêcher de sourire. Après tout le sujet portait sur l’électricité !
Et dans ce cas, un peu de tension ne fait pas de mal.
Passons sur cette plaisanterie de mauvais goût sans doute et regardons le fond du désaccord.
La Directive Red III
Le contexte est le suivant. Une directive européenne doit être votée par le parlement européen et les Etats membres de l’UE. (2)
Elle s’appelle RED III et porte sur l’évolution de la directive RED II, elle-même portant sur les énergies renouvelables au sein de l’UE.
L’idée générale est de rehausser les objectifs européens en matière d’énergie verte pour que l’UE devienne une économie neutre en carbone d’ici 2050.
Cela suppose, d’après le texte, une réduction des émissions de gaz à effet de serre de 55% d’ici 2030, autant dire demain.
Et compte tenu des efforts qu’il va falloir fournir, si ce texte passe, les européens discutent ferme entre eux.
Des situations semblables mais des stratégies différentes
L’Espagne, la France et l’Allemagne sont des pays ultra dépendants sur le plan énergétique.
L’Espagne ne dispose pas d’hydrocarbures. Le pays est le 7e plus gros importateur mondial de pétrole et 13e de gaz naturel. (3)
L’Espagne produit 12% d’énergie, grâce au nucléaire et un peu plus grâce au énergies renouvelables, soit 25% environ hors hydrocarbures. (4)
Le pétrole représente 42% de son énergie primaire et le gaz naturel 25%. (5)
Le mix allemand est semblable : 17% d’énergies renouvelables, et 80% d’hydrocarbures. Le nucléaire ne compte que pour 3%. (6)
En France, le nucléaire représente 40% de l’énergie primaire, puis viennent le pétrole (28%) et le gaz naturel (16%). Les énergies renouvelables représentent 12% du total de l’énergie primaire. (7)
La vraie différence entre ces mix vient du nucléaire.
Sans surprise, la France veut le compter comme une énergie verte alors que l’Espagne et l’Allemagne s’y opposent.
Si le nucléaire était compris comme une énergie verte, la France serait à 52% d’énergie verte alors que la France a fait moins d’efforts dans le domaine des énergies renouvelables que l’Allemagne et l’Espagne.
Les partenaires de la France estiment, sans le dire aussi ouvertement, que ce serait une escroquerie !
L’hydrogène rose
La position de la France est en réalité un peu plus sioux.
Elle propose de faire de l’hydrogène rose un hydrogène vert.
L’hydrogène n’a pas vraiment de couleur, c’est un gaz à peine perceptible à l’oeil nu.
Mais dans la nature, il n’est jamais seul, il faut le séparer d’autres éléments.
On en trouve dans l’eau (H2O) par exemple ou dans le méthane (CH4).
Séparer l’hydrogène de l’oxygène (électrolyse) ou du méthane (vaporeformage) demande beaucoup d’énergie.
Et selon les modes de production, les industriels ou leurs services de communication ont attribué des couleurs à l’hydrogène.
On parle :
- d’hydrogène gris s’il est produit par vaporeformage ; (8)
- d’hydrogène bleu s’il est produit par vaporeformage mais que le CO2 produit est capté lors de l’opération ; (9)
- d’hydrogène vert s’il est produit par électrolyse réalisée avec des énergies renouvelables ; (10)
- d’hydrogène rose s’il est produit par électrolyse réalisée avec de l’électricité obtenue grâce au nucléaire. (11)
La France aimerait que l’hydrogène rose qu’elle est susceptible de produire soit intégrée dans la directive RED III.
1,5 milliards de petits chinois, autant d’indiens, 2,5 Africains, autant en Indonésie, Malaisie,+ l’Amérique du Sud, + le Mexique, vous croyez que tous ces gens là qui mangent tout juste à leur faim vont se transformer en écolo-bobos comme les Européens ?