Les images des poubelles s’amoncelant dans les rues de Paris ont fait la une des médias nationaux pendant plusieurs jours.
La Ville lumière est devenue une grande centrale de déchets. (1,2)
Plusieurs milliers de tonnes jonchaient les trottoirs.
Les touristes se sont inquiétés de voir arriver de nouvelles épidémies. Charles III d’Angleterre a décalé sa venue à Paris. La fréquentation des restaurants a baissé. Les parisiens étaient résignés ou en colère (3,4)
Les éboueurs étaient en grève.
Un métier difficile en quête de reconnaissance
Comme la plupart des Français, les éboueurs sont opposés à la réforme des retraites lancée par le Gouvernement.
Pour les employés municipaux, cela veut dire quitter son travail à 59 ans au lieu de 57 ans.
Ils considèrent leur métier comme pénible et veulent que cela se sache.
Surtout, ils ne veulent pas se retirer plus tard alors que leur espérance de vie serait plutôt inférieure à celle des autres.
En constatant cette situation, je me suis demandé comment les Parisiens et plus généralement les Français se débrouillaient avant que n’existent ni les grèves, ni les éboueurs, ni les poubelles…
Une chose est sûre : Paris et les grandes villes de France ont longtemps été des cloaques. (5)
La distinction entre déchets ménagers et déchets des toilettes n’existaient pas vraiment. (6)
Tout allait à la rue ou dans les fleuves !
La grève de ces derniers jours n’est rien à côté de ce que les habitants des grandes villes ont vécu par le passé !
En regardant comment faisaient nos ancêtres, on s’aperçoit que les questions d’hygiène, de gestion de l’eau potable et de gestion des déchets sont étroitement liées.
Les citadins de l’Antiquité inventent les toilettes publiques et les canalisations
Tant que Homo sapiens était nomade, la question des déchets ne se posait pas vraiment.
Les déchets se décomposaient dans la nature. (7)
Avec la sédentarisation et l’apparition des premiers hameaux, puis des villages, la question des déchets n’a pas semblé être un problème non plus. (8)
En Europe, les premières toilettes publiques sont apparues en Grèce dès 2700 avant JC. (9)
Les premiers systèmes d’évacuation d’eau datent aussi de cette époque. (10)
A Athènes, les déchets étaient emportés hors de la ville. (11)
Les Romains ont construit de vastes réseaux d’égouts. Au départ, il s’agissait surtout de canaux extérieurs, situés au milieu des rues. Puis, ces canaux ont été recouverts. Ils avaient des toilettes publiques et privées.
À Rome, la canalisation passait sous les sièges de bois ou de marbre des uns et des autres et les excréments partaient dans le Tibre qui faisait office de chasse d’eau pour tous. (12)
Ce simple fait est tout de même remarquable quand on sait que la ville comptait près d’un million d’habitants à son apogée au 1er siècle ap JC ! (13)
En France, il faudra attendre 19 siècles avant que les villes ne retrouvent un système généralisé d’évacuation des eaux usées.
Les premiers pavés de Paris…
Les pavés ne sont pas venus à Paris ou ailleurs pour que des étudiants puissent les lancer sur les CRS les jours d’euphorie révolutionnaire.
En réalité, ils ont été introduits sous Philippe Auguste dans la capitale pour des questions d’hygiène. (14)
Entre la fin de l’Empire romain et l’an mille, tout le monde vit plus ou moins au vert.
Même les grandes villes ne sont que de gros villages cerclés de champs et associés à une ou plusieurs abbayes.
Mais à partir du 12e siècle, les villes grossissent. Il n’y a pas encore de système de canalisations. On a oublié comment faisaient les Romains. Tout le monde jette ses déchets sur la route.
Ces derniers ont tendance à s’accumuler. Les routes sont boueuses, glissantes et puantes. (15)
Las, le Roi de France ordonne de paver les rues principales, d’y mettre des canaux et de creuser des fossés centraux pour nettoyer certains quartiers. (16)
Le temps des épidémies à Paris
Un siècle plus tard, quelques règles de vivre ensemble sont ajoutées : chacun doit nettoyer devant sa porte et est prié de ne pas laisser ses déchets et autres ordures dans la vicinité. (17)
Progressivement sont installés des bains publics ou étuves et des trous punais ou puits à immondices.
Au 14e siècle, les déchets sont couverts. Malgré ces améliorations, l’hygiène reste précaire. De graves épidémies surviennent souvent.
Les siècles passant, les choses se gâtent. On vit mieux à Paris au 13e siècle qu’au 15e !
Les étuves deviennent immondes et sont mal fréquentées. Les Parisiens ne respectent pas les règles d’hygiène promulguées par les édits royaux.
Louis XII, puis François 1er font nettoyer la ville de fond en comble. Mais rien y fait. Les déchets reviennent toujours et avec eux de nombreuses maladies. De graves épidémies frappent la ville. La peste sévit régulièrement. (18)
Finalement, au 16e siècle, l’élevage de cochons, de lapins et de pigeons (oui, oui) est interdit dans Paris. Les trous punais sont fermés et interdits. Le nettoyage des rues devient obligatoire et plus fréquent. Chaque maison est dotée d’une fosse. (19)
Mais la loi n’est pas toujours respectée et les maisons sont poreuses. Bref, la situation sanitaire de Paris reste précaire.
Henri IV fait construire la première machine hydraulique pour que la ville puisse avoir de l’eau potable.
Sous Louis XIV, l’Etat se met à appliquer les lois. Des amendes sévères sont imposées à ceux qui ne jettent pas leurs déchets.
De plus en plus, des chiffonniers nettoient la ville. Ils récupèrent, les vieux vêtements, les bougies, les os d’animaux dont on fait des bougies, des tissus dont on fait du papier, etc.
Je me régale toujours à vous lire, merci d’exister !