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Panne d’électricité : que s’est-il passé en Espagne et au Portugal au mois d’avril ?

Chers lecteurs,

Le 28 avril 2025, une panne d’électricité massive a frappé l’Espagne et le Portugal. Pendant quelques heures, ces deux pays ont connu un blackout total.

Mais le réseau a été rétabli assez rapidement : en moins de 12 heures. (1,2)

Les médias français ont peu parlé de cet événement pourtant très important pour la péninsule Ibérique, mais aussi pour la France et l’Europe.

Pour faire le point sur ce sujet, Idriss Aberkane a interviewé, sur sa chaîne Internet, un expert qui connaît bien le sujet : Nicolas Meilhan. (3)

Cet ingénieur spécialisé dans le domaine de l’énergie a été conseiller scientifique auprès de France Stratégie. Il est membre du think tank Les Éconoclastes. (4)

Il défend la transition énergétique, tant qu’elle reste scientifique et réaliste. Il se méfie des visions idéologiques ou religieuses de l’écologie.

Que s’est-il passé en Espagne et au Portugal 

À 12h33, 15 GW de production électrique ont disparu en 5 secondes en Espagne.

Cela représentait 60 % de la production totale d’électricité dans le pays.

Cette chute soudaine a provoqué une instabilité du réseau.

Or, le réseau d’électricité en Europe est censé rester à une fréquence de 50 hertz environ.

Si cette fréquence chute ou augmente brutalement, le réseau cesse de fonctionner. Des mécanismes de sécurité sont alors mis en place.

Ainsi, pour éviter que l’ensemble du réseau européen ne disjoncte, l’Espagne a été déconnectée du réseau français.

Et son système de production électrique s’est effondré.

Le pays et son voisin lusitanien, très dépendant des approvisionnements espagnols, ont été plongés dans le noir.

Les métros, les trains, les réseaux de téléphonie et les feux de signalisation ont cessé de fonctionner.

Les hôpitaux ont eu recours à leurs générateurs d’urgence.

Les aéroports internationaux de Madrid et de Lisbonne ont été fermés temporairement. (5)

Quelle est l’origine du problème ?

Pour l’instant, aucune cause officielle n’a été retenue. Il va y avoir une enquête. Cela peut prendre du temps.

L’hypothèse d’une cyberattaque a toutefois été écartée par les autorités espagnoles. (6)

Les responsables du réseau ont évoqué la présence d’un nuage ou d’un ensemble de nuages qui auraient eu un effet soudain sur la production de l’énergie solaire.

Certains experts évoquent des défaillances techniques ou des oscillations interrégionales.

L’enquête est toujours en cours, et pour l’instant, aucune explication solide n’a été donnée, ce qui, pour l’ingénieur interviewé, est tout de même suspect. (2)

Selon lui, les raisons de ce silence sont politiques.

Le stockage : un élément clef de la problématique électrique

Nicolas Meilhan explique qu’avant de chercher les causes, il faut déjà comprendre le contexte.

Selon lui, le problème de l’électricité est qu’aujourd’hui, on ne sait pas la stocker en grande quantité à des coûts compétitifs.

Cette difficulté oblige les acteurs du réseau à adapter en permanence l’offre à la demande.

Si la demande augmente, il faut relancer les unités de production ; si la demande baisse, il faut en arrêter.

Or, toutes les technologies n’offrent pas cette souplesse de gestion au réseau.

Les énergies fossiles, le nucléaire et l’hydraulique apportent une énergie continue.

En revanche, l’éolien et le solaire sont des énergies intermittentes, susceptibles d’augmenter ou de chuter à tout moment.

Le réseau, pour bien fonctionner, ne peut pas dépendre uniquement de ces énergies intermittentes.

Les solutions de stockage existent, mais ne sont pas encore suffisamment développées

Pour stocker de l’électricité, il faudrait construire des batteries géantes ou utiliser le stockage hydraulique.

Cette technique consiste à utiliser de l’électricité en surplus pour pomper de l’eau et la stocker dans des réservoirs en altitude.

Lorsque la demande en électricité augmente, l’eau des réservoirs est relâchée et produit de l’électricité grâce à des turbines hydroélectriques.

Cette technique de stockage est fiable et rapide à mettre en place. C’est une technologie maîtrisée. Elle est évidemment plus facile à mettre en œuvre dans les régions de montagne.

La France, bien que souvent critiquée, se révèle être un modèle en matière de protection de l’environnement, avec une production d’électricité majoritairement décarbonée grâce au nucléaire.

Cependant, la transition vers l’électricité est freinée par notre dépendance aux énergies fossiles qui représentent 65% de notre consommation.

Cette pétition appelle à une prise de conscience et à un soutien accru pour le nucléaire, afin d’accélérer notre production électrique décarbonée et faire face au réchauffement climatique.

La forte dépendance au solaire du réseau espagnol

La panne qui a frappé l’Espagne sanctionne le fait que ce pays soit un bon élève de l’Union européenne.

C’est pour avoir trop bien suivi la doxa européenne, et plus particulièrement celle de la Commission européenne, que l’Espagne s’est retrouvée dans une telle situation.

En effet, entre 2020 et 2024, l’énergie solaire en Europe a été multipliée par quatre.

La production d’électricité en 2024 aurait été de 125 GW environ, dont 45 produits par l’Allemagne et 20 par l’Espagne. (2)

Quelques jours avant la panne générale espagnole, les autorités hispaniques se vantaient de produire plus de 90 % de leur électricité grâce au solaire. (2)

Cette prouesse cachait une faiblesse : dépendre autant d’une énergie intermittente peut faire sauter tout le système si la production chute brusquement.

Car au même moment, seuls 4 réacteurs nucléaires sur les 7 présents en Espagne fonctionnaient.

Il est du reste courant que des réacteurs nucléaires ne soient pas mis en fonctionnement : les opérations de maintenance ou de surveillance peuvent nécessiter un arrêt temporaire de l’installation.

En clair, au moment de la crise, plus de 90 % de l’électricité produite sur la péninsule Ibérique venait de sources intermittentes.

D’après Nicolas Meilhan, cet équilibre est trop fragile et aléatoire.

Aurait-on pu éviter cette panne générale ?

Au cours de l’interview, l’ingénieur rappelle qu’en Espagne, sur les dernières années, 108 barrages hydroélectriques auraient été retirés.

Ces 108 installations produisaient 3 GW d’électricité par an. Il est possible que cette production ait suffi à limiter le choc causé par l’effondrement de la production solaire. (7)

Cette évolution s’est faite pour des raisons écologiques, souvent liées à des enjeux locaux.

Pour lui, si ces barrages avaient encore été là, le risque de crise aurait été moindre, en raison de l’effet stabilisateur de la production hydraulique, qui est moins aléatoire.

Il rappelle, pour autant, que même la production d’hydroélectricité peut être soumise à des contraintes.

C’est ce qui s’est passé en France en 2022, après deux saisons particulièrement sèches qui ont vu les niveaux d’eau des fleuves baisser. (7)

La production électrique baisse en Europe

Notre ingénieur donne une autre information très importante, qui n’a pas été discutée dans les médias : le marché de l’électricité en Europe est au point mort.

La production électrique n’augmente plus, sauf dans le domaine des énergies intermittentes.

Cette nouvelle structure du marché européen le rend moins stable.

Par ailleurs, la coordination entre les différents marchés nationaux n’est peut-être pas encore totalement au point.

Ainsi, Nicolas Meilhan rappelle que, vers midi, une partie de l’électricité produite en Allemagne, notamment via ses sites solaires, est ouverte à l’exportation.

Cet afflux massif et soudain d’électricité peut perturber le réseau européen.

Dans l’affaire espagnole, il y a pu avoir une combinaison néfaste entre une mauvaise gestion européenne du réseau et des conditions climatiques locales inattendues.

Une journée de pause en Espagne

Heureusement, malgré la gravité de l’incident, les conséquences en Espagne, liées à l’événement, sont restées limitées.

Une douzaine de personnes seraient tout de même décédées à cause des coupures de courant.

Sur une population de 50 millions d’habitants, cela reste circonstancié.

Car les ingénieurs espagnols ont été très efficaces et ont pu rétablir le système en moins de 12 h, ce qui, pour Nicolas Meilhan, est très rapide.

Il précise que lors d’un épisode semblable au Texas, il a fallu plus d’une semaine aux ingénieurs américains pour relancer parfaitement le réseau.

Pour beaucoup de personnes, cette journée a été une pause forcée.

Plus aucune machine électrique ne fonctionnait.

Et la plupart des gens n’ont pas pu travailler.

Tout le monde s’est arrêté. Et de nombreuses personnes en ont profité pour se parler, pour passer du temps ensemble, ce qu’ils ne faisaient pas forcément d’habitude.

Cette pause générale n’a cependant pas été agréable pour tout le monde.

Les patients bloqués dans les cabinets de dentistes ou médicaux ont passé une très mauvaise journée.

Et ceux qui n’avaient pas de monnaie pour payer leurs achats ont été obligés de ne rien acheter ce jour-là.

Par ailleurs, un certain nombre de taxis en ont profité pour augmenter leurs prix.

Il fallait des centaines d’euros pour se déplacer à plusieurs dans un taxi, payable en espèces uniquement, évidemment.

Quels enseignements faut-il tirer de cette panne générale espagnole ?

Pour Nicolas Meilhan, la crise espagnole est un avertissement. Elle est comme un carton jaune, non pas pour l’Espagne, mais pour l’ensemble du réseau européen.

Il semblerait que le réseau européen de l’électricité ne soit pas encore totalement bien coordonné.

L’intérêt de son analyse est qu’elle réintroduit un aspect central dans le débat sur l’énergie.

Le réseau européen ne peut pas reposer sur une production d’énergie intermittente comme l’éolien et le solaire.

En d’autres termes, l’hydraulique, la géothermie, le gaz et le nucléaire n’ont pas dit leur dernier mot.

Et il serait absurde de se passer de ces différentes sources d’énergie permanentes pour privilégier le solaire ou l’éolien.

Et si d’autres pannes générales devaient arriver en Europe, n’oubliez pas d’avoir avec vous ou chez vous un peu d’argent liquide pour régler les dépenses courantes.

La possible instabilité du réseau électrique rend aussi illusoire et dangereuse l’idée d’imposer un euro numérique à toute l’économie européenne !

Solidairement,

Julien

La France, bien que souvent critiquée, se révèle être un modèle en matière de protection de l’environnement, avec une production d’électricité majoritairement décarbonée grâce au nucléaire.

Cependant, la transition vers l’électricité est freinée par notre dépendance aux énergies fossiles qui représentent 65% de notre consommation.

Cette pétition appelle à une prise de conscience et à un soutien accru pour le nucléaire, afin d’accélérer notre production électrique décarbonée et faire face au réchauffement climatique.

Partagez-nous vos idées et vos textes de pétition en cliquant ici.

Pourquoi créer une pétition ?

Il est important et nécessaire que les opinions et valeurs des citoyens soient prises en compte en permanence et pas uniquement au moment des échéances électorales.

Une pétition est un moyen d’action efficace, pour que les citoyens reprennent le pouvoir sur les combats qui leur semblent justes.

Vous aussi, prenez part à la mobilisation citoyenne !

1. « Énergie : pourquoi la méga-panne de courant en Espagne pourrait bien ne pas être la dernière en Europe », Courrier International
« Panne géante d’électricité en Espagne : 15 gigawatts disparus en 5 secondes, une quatrième enquête ouverte pour déterminer l’origine », L’Indépendant

2. Chaîne « Association ASPO FRANCE », « Nicolas Meilhan : Transition Énergétique », Youtube

3. « Nicolas Meilhan », A-Speakers

4. « Une consommation électrique qui a chuté de moitié : l’Espagne et le Portugal touchés par une coupure massive d’électricité », BFMTV

5. Idem

6. « Panne d’électricité en Espagne : la piste de la cyberattaque écartée, mais la cause reste mystérieuse », Numerama

7. « Bilan électrique 2023 – Europe », RTE France

8. « Panne électrique en Espagne : témoignages », Le Petit Journal

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10 Comments
Commentaires en ligne
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Pascal
4 jours il y a

Je trouve curieux de promouvoir ainsi le nucléaire, avec de l’uranium approvisionné par le passé au Mali et maintenant en Russie, sans compter le souci majeur des déchets. Quand au Thorium, sa demi-vie est également très longue (1,405 × 1010 années !)
Pour ceux qui n’étaient peut-être pas nés à l’époque, il y avait eu une panne un peu du même type en France lors d’une période de grand froid en 1979 ( de mémoire), alors que le nucléaire était en plein essor.

Clémentine
5 jours il y a

Bonjour Damien, je suis étonné que vous ne parliez pas du tout de ce que à évoquer le spécialiste pendant l’interview : la société RTE et la pose de la ligne très haute tension le long des côtes et sur les terres au niveau des Landes(d’ailleurs qui pose énormément de problèmes , notamment l’illégalité et la destruction de la nature) imposée par la Préfète, contre la vie des maires et bien sûr à l’insu des populations. Cette ligne va desservir l’Espagne.

Léonel de LAUBESPIN
5 jours il y a

Dans cet article, comme bien souvent ailleurs, il y a confusion entre GW et GWh.
Une production d’électricité s’exprime en GWh; une puissance en GW.

Phalê
5 jours il y a

si le nucléaire est plus souple que les énergies intermittentes, c’est à lui de se retirer quand les autres sont fortes, et de compenser leurs manques. Le gaz peut bien dépanner quand l’électricité manque.

5 jours il y a

Les trilliardaires pourraient ce fabriquer pour leurs business et la collectivité des yatchs avec SMR et donc gros réacteurs nucléaires.
Ou les cargos xxl .
La France n’a plus les moyens de s’équiper d’autres centrales : risques que ce soit le petit truc de trop…

richard CROSES
5 jours il y a

Le problème de l’écologie et des ses fanatiques bloque le rétablissement de sources énergétiques fiables. Les centrales à gaz, fuel, charbon qui ne rejettent que du gaz carbonique et de l’eau sont discréditées par ces ignorants.
La place des nazis, des écologistes et autres socialistes est le bagne. Bien cordialement!

cauet
5 jours il y a

très intéressant et instructif!! merci.

Sylvain H.
5 jours il y a

Merci pour cet article. Ok pour le nucléaire, mais au thorium qui est beaucoup plus écologique et moins dépensière en matière. Le thorium on en trouve partout sur la planète. Les chinois ont construit leur première centrale avec grand succès..

Michel09
5 jours il y a

Sans compter que ces énergies intermittentes, le solaire et l’éolien ont des conséquences dramatiques sur l’environnement, je veux dire sur le climat ! ralentissement des vents pour l’éolien, et restitution importante d’Infra Rouges qui ne sont pas absorbés par les plantes et qui vont, de fait, contribuer fortement à un réchauffement massif de leur environnement pour les capteurs solaires…

Luc Bodart
5 jours il y a

merci Julien pour les explications liées au blackout espagnol.
Je rappelle que dans les faits (hors catégorisation administrative abusive), le nucléaire n’a rien de durable : les ressources sont limitées et non renouvelables et les déchets (de production et de démantèlement), monstrueusement toxiques sur des périodes quasi infinies, sont impossibles à stocker sans intervention humaine permanente et sans risque d’accident.
En arrière plan, votre discours exprime donc que vous êtes là pour vous gaver tandis que les suivants géreront les merdes. Face à ce constat, la seule attitude humaine et responsable est de limiter drastiquement notre consommation d’énergie. Cela implique une remise en question totale de notre système économique et politique mais cela serait une preuve d’intelligence et de sagesse que de pousser fermement dans cette direction.

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Il est important et nécessaire que les opinions et valeurs des citoyens soient prises en compte en permanence et pas uniquement au moment des échéances électorales.

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