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loup

Qui a peur du loup ?

Il y a quelques semaines, un échange assez vif a eu lieu entre Hugo Clément, journaliste et Joseph Boussion, berger.

Le journaliste a publié sur les réseaux sociaux une vidéo sur l’abattage d’un loup réalisé par un de ses amis, vidéaste. Ce faisant, il critique les louvetiers qui, selon lui, ont tué l’animal sans raison.

Le berger lui répond via une autre vidéo dans laquelle il se plaint de cette manière de procéder. Il précise que les louvetiers n’abattent des animaux que dans le cadre de “tirs de défense” autorisés par les services de l’Etat.

Plus d’un million de vues

Cette information, à première vue anecdotique, a circulé très rapidement.

Les vidéos ont été visionnées et partagées par des centaines de milliers de personnes. Et sur les réseaux sociaux, les insultes fusent entre pro bergers et pro loups.

Les médias traditionnels eux-mêmes se font l’écho de cet incident, notamment dans le journal Le Point ici ou dans le magazine Paris Match ici.

Un même fait, deux versions

Que s’est-il passé exactement ?

La scène se déroule dans le massif Alpin.

D’après le photographe, un loup s’est approché d’un troupeau de moutons. Les chiens n’ont pas bougé. Le loup se serait alors reculé en pensant qu’il n’avait rien à faire là.

C’est à ce moment que les louvetiers l’auraient lâchement abattu alors qu’il ne représentait aucune menace.

Pour le berger, le loup se retirait pour mieux attaquer. Son comportement indiquait une attitude prédatrice. Et c’est pour cette raison que les louvetiers ont effectué “un tir de défense”, validé au préalable avec la préfecture.

Les deux parties semblent défendre un point de vue valable.

Les bergers habitent la montagne depuis des millénaires. Ils ont combattu le loup pendant autant de temps.

La montagne, c’est leur maison. Pourquoi devraient-ils accepter que les loups y vivent ?
En même temps, faut-il tuer les loups s’ils ne représentent pas de danger immédiat ?

Ce dernier pose la question de l’appréciation de la situation.

La nature sauvage disparaît

Si cet événement suscite une telle passion, c’est qu’il remue en nous des choses très profondes. C’est une histoire, des peurs et une angoisse existentielle.

Le rapport des êtres humains à la nature est paradoxal.

Pendant des siècles, nous avons lutté contre elle. Mais le rapport de force semble s’être inversé.

Il y eut la lente maîtrise de l’agriculture, les moines défricheurs, le drainage des marais, la canalisation des fleuves…

Tout cela :

  • a fait reculer les maladies,
  • a assuré l’approvisionnement régulier des habitants et éliminé les famines,
  • a favorisé l’hygiène dans les villes,
  • a permis la distribution de l’eau et de l’énergie,
  • Etc.

Les humains ont découvert toute l’étendue de la planète sur laquelle il leur est donné de vivre. Ils ont cultivé la terre, domestiqué les animaux et habité les régions les plus inhospitalières.

Et durant toutes ces années, la nature a reculé, la vie sauvage s’est raréfiée. De très nombreuses espèces se sont éteintes.

En France, le loup avait totalement disparu avant de revenir d’Italie en passant par les Alpes.

Et maintenant ? 

De plus en plus de personnes pensent que la disparition progressive du monde sauvage de la surface de la terre, du fait de l’expansion de l’habitat humain, a quelque chose de triste et d’inconfortable.

Certains pensent même que ce n’est pas acceptable.

Cette tristesse, partagée par des milliers de personnes, qu’elles habitent à la ville ou à la campagne n’est pas qu’une émotion simple.

L’œil humain n’a plus guère l’occasion de rencontrer une lande désolée, une forêt primaire, voire une montagne sans touristes.

La disparition des grands mammifères et des grands prédateurs incarne ce retrait du monde sauvage.

Les éléphants, les baleines, les tigres sont en voie d’extinction. Le loup de Tasmanie, lui, n’est plus.

Le loup gris en revanche n’est pas menacé.

Mais il représente, avec les ours des Pyrénées ou les lynx des Vosges, la part de vie sauvage qui reste en France.

Ce sont des symboles.

Et c’est pour cela que les écologistes y tiennent.

Dans cet échange entre les deux hommes, c’est Joseph Boussion qui résume le mieux la problématique. Il affirme :

“Il faut que l’on apprenne à respecter cette frontière entre le sauvage et le domestique.”

Sortir du manichéisme

A l’évidence le berger est conscient des enjeux.

Ils ne veulent pas la fin du loup.

Mais il revendique pour les bergers le droit de pouvoir l’abattre lorsque cela est nécessaire. Et pour ce faire, il rappelle qu’il y a des procédures, des discussions, un travail en commun entre les acteurs de terrain et les représentants de la force publique.

Ce qu’il reproche au journaliste en fin de compte, c’est son manque d’empathie envers les bergers et sa condamnation facile.

Il y aurait les bons loups d’un côté et les mauvais louvetiers de l’autre…

C’est un peu rapide…

Une question de civilisation

Soyons clairs : la vie sur terre sans les loups, ni les ours, ni les éléphants, ni les baleines est possible.

Les animaux sauvages sont importants parce qu’ils sont beaux, forts et libres. Ils ne respectent pas les règles posées par la société. Ils vivent.

Ils nous rappellent la violence de la vie, l’importance de l’élan vital.

Une société qui ne serait que fonctionnelle sans place pour la nature serait vite vide de sens.

Joseph Boussion rappelle que le travail des bergers est essentiel. Il permet de domestiquer la montagne, de la rendre accueillante au visiteur qui passe, d’éviter les avalanches.

Tout cela est exact.

Et demain ?

Mais le travail du photographe animalier est important aussi. C’est lui qui nous permet de découvrir le monde mystérieux des bêtes sauvages…

Bref, la parole des deux est utile et leur dialogue mérite d’être mené.

Peut-être arriverons-nous un jour à définir des zones sanctuaires où la main de l’homme n’intervient pas.

Ces zones pourraient être reliées entre elles par des couloirs pour les animaux sauvages ?

Le problème est que cet espace n’est pas forcément extensible…

A moins, bien sûr, que l’on ne parvienne à développer rapidement des voitures volantes et que l’on puisse ainsi libérer de nombreuses routes et autoroutes…

Cet espace goudronné devenu inutile pourrait alors être dévolu à la préservation de la nature, comme on le fait parfois avec les anciennes voies ferrées.

Mais ce n’est peut-être pas pour tout de suite.

En attendant donc, il faudra continuer le dialogue…

Solidairement,

Julien

 

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230 Comments
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MOLINÉRI
3 années il y a

« Joseph Boussion rappelle que le travail des bergers est essentiel. Il permet de domestiquer la montagne, de la rendre accueillante au visiteur qui passe, d’éviter les avalanches. »
Je ne suis pas d’accord.
De trop nombreux troupeaux d’ovins détruisent un écosystème fragile en montagne.
Eviter les avalanches ??

QUERE
3 années il y a

Bon plaidoyer pour la vie sauvage dont le loup est un des représentants emblématiques. Sans le sauvage, nous ne sommes rien ! Le film « marche avec les loups » de Jean-Michel Bertrand (http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=262485.html) est, à ce titre, très parlant : il nous fait aimer cet animal intelligent, solidaire, organisé… et montre qu’il ne représente pas plus de danger pour l’homme que certains chiens. En Italie, il est semble t’il accepté, alors pourquoi la France est -elle si acharnée à le détruire ?

Jacques Dussuyer
3 années il y a

Depuis quand la montagne appartient-elle aux bergers ??

CYRIL
3 années il y a

Pour moi le loup a sa place et il serait plus efficace avec le lynx, l’ours que les chasseurs qui sont dépassés par les sangliers, qu’ils agrainent par ailleurs. J’habite en Chartreuse et les dégâts que je vois ce sont des champs labourés par les sangliers. Mon voisin éleveur de brebis en bio a des chiens et donc n’a encore eu aucun problème en plusieurs années. Vous évoquez des sanctuaires (idée louable que je partage) ce que l’Aspas a mis en place dans le Vercors. Du coup agriculteurs, éleveurs chasseurs sont vent debout contre ce projet. N’oubliez pas que les éleveur sont souvent des chasseurs ! ! !

Flo
3 années il y a

Vous continuez de propager l’idée FAUSSE que les bergers sont contre les loups et de favoriser les clivages idéologiques. J’habite dans un alpage, et sur huit bergers que j’ai pu côtoyer, seuls deux étaient contre la présence des loups. Les six autres, estimaient qu’il y avait la place pour tous, et que les humains ne devaient pas s’octroyer le droit de décider qui doit vivre ou mourir. Ces bergers ne prennent pas la parole et ne « crient pas aux loups » comme les autres. Et ils ne craignent pas non plus les attaques car elles sont assez peu nombreuses avec le triptyque gardiennage, chiens et filets électrifiés. La grande majorité des attaques en France arrivent lorsque ces éléments manquent.

Mouraud Jean François
3 années il y a

Le loup que l’homme (prehistorique) a récupéré des louveteaux en isolant les caractères dociles des agressifs pour en faire leus animaux de compagnie, devenus nos chiens d’aujourd’hui, hante la vie des chasseurs, cela même qui font la même chose que le loup et le renard, ils chassent……A la différence près la vie sauvage pour vivre et l’autre pour son plaisir !!!!!! Qui est vraiment le loup ???? « Bête de l’ancestral Gevaudan  » qui hante une peur du même age que « la Bête » !!!!! Qui doit on faire disparaître le chasseur ou la proie ???????

Merrie
3 années il y a

Ceette article est excellent, équilibré, une recherche d’entente dans une situation compliquée pour tous.

Foucault
3 années il y a

Ce discours plutôt lénifiant et protégeant d’une certaine manière les hommes qui ne tolèrent pas la présence du loup, ne peut justifier l’extermination d’un animal présent sur ces terres bien avant l’homme…
la toute puissance des éleveurs et des agriculteurs en france justifie tout acte de destruction de la faune et la flore, ce qui est inacceptable.
il suffit de reprendre la dernière décision du gouvernement permettant aux cultivateurs de betterave de continuer a exterminer les abeilles en utilisant ce produit nocif et destructeur.
si nous savions tous que cette agriculture dévastatrice est en train de nous tuer avec l’utilisation des pesticides permettant l’enrichissement de ces acteurs , nous verrions peut être différemment les choses en comprenant que nous sommes Aussi victimes de la meme soif aveugle de profit que le loup.
quand nous le comprendrons il sera trop tard pour cette espèce.
notons que l’Italie et l’Espagne ainsi que l’allemagne vivent eux en bonne intelligence avec les loups plus nombreux sur leurs territoires car non détruits.
pourquoi la France est elle encore le mauvais élève ? Sans doute parce que nos politiques sont lâches et qu’ils soutiennent absolument certains lobby qui les font elire…

lacompagniedeslapinsbleus
3 années il y a

Merci de votre analyse.

Jaouen JP
3 années il y a

D’accord sur beaucoup mais l’homme n’a pas lutté « contre » la nature, il a lutté pour vivre, avec. Le loup venu d’Italie ? Seul ? Le doute subsiste.
Dans l’ensemble il manque l’évolution de la population qui est devenue majoritairement urbaine et beaucoup d’entre elle n’a eu ou n’a que peu de relation avec la nature et l’animal qu’il soit domestique ou sauvage. Ce n’est pas une question d’écolos en 1er chef ou alors des écolos de la catégorie citée, l’écologie ne s’arrête pas à la question animale.

Gabriel CHEL
3 années il y a

Un élément important (crucial) du problème est de savoir jusqu’à quel point le loup est dangereux pour l’homme(en l’occurrence surtout pour les enfants, les femmes, les vieillards, mais pas seulement…).

Je vous invite à lire l’article suivant de wikipedia « Attaques de loup sur l’homme » qui fait le point sur cette question :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Attaque_de_loup_sur_l%27homme

Pour trouver cet article,
faire une recherche GOOGLE sur : attaque du loup sur l’homme

Dany
3 années il y a

Je pense qu’il y a surtout des bergers paresseux, des chasseurs alcooliques et des humains idiots ! Pour le reste, il n’y a pas besoin d’avoir fait de hautes études pour se rendre compte que dans ce monde où tout est lié à l’argent, la nature sauvage qui est à l’origine de tout, n’intéresse finalement plus personne.

stievenard
3 années il y a

les loups ont le droit de vivre aussi .ils ont leurs territoires. il y a rien de plus con que la race humaine qui détruit tout .tout leur appartient et les chasseurs qui tuent tout ce qui bouge même sur les gens connards

jim
3 années il y a

l’humain est lepire parasite que la terre ait portè, et il faudrait l’eradiquer a grand coup de mitraillette , en commençant par ses sauvages et leur famille

Raimbaud Fabienne
3 années il y a

Oui, bien sûr, je comprends l’angoisse des bergers face aux loups. Retrouver ses bêtes égorgées est horrible mais je pense également qu’un « partage » des territoires avec les espèces sauvages, dont le loup, est indispensable pour que notre terre reste un espace de biodiversité, indispensable à la vie tout simplement. Il y a des moyens de lutter contre les attaques des loups. Il semblerait qu’en Italie, la cohabitation fonctionne. Des chiens de défense peuvent dissuader les prédateurs de s’attaquer au bétail. Nous faisons parti d’un ensemble fragile, déjà fortement détruit par des incursions, toujours plus nombreuses, de l’espèce humaine. Apprenons à vivre ensemble, humains et animaux sauvages, en préservant nos animaux domestiques. Ce n’est pas impossible !

Noel
3 années il y a

Bonsoir, je viens de lire votre article… qui essaie d’expliquer les 2 arguments pro loup et pro berger . Je me pose ces questions : comment se fait-il que les louvetiers soient présent au moment de « l’attaque » , le Berger n’était pas seul avec ses chiens ? Ou le tir sur le loup s’est passé après ( et dans ce cas c’était un tir prémédité) ! Ensuite je pense que les bergers de maintenant ne sont pas ceux d’il y’a des millénaires et il me semble que les loups peuplaient les montagnes avant eux ! Une petite citation pour faire réfléchir : « la faiblesse de l’argument du moindre mal à toujours été que ceux qui choisissent le moindre mal oublient très vite qu’ils ont choisi le mal »( Hannah Arendt)

Borenstein Michele
3 années il y a

Si ils visent si bien , les louvetiers , pourquoi ne pas faire peur aux loups avec une balle qui explose ou fait beaucoup de bruit sans faire de mal , les loups apprendraient doucement que les moutons ne leurs sont pas destinés ?!!!!

Michael CARRECABE
3 années il y a

Le loup n’est pas introduit contrairement a ce que penser certaines personnes. Il ne fait que reconquérir sont territoire. territoire qui lui appartenait. la montagne n’est pas la maison des seuls Bergers. Le loup l’occupait bien avant l’homo sapiens sapiens que nous sommes. Et puis tout ca est un faut debat. Tous ces bergers qui pleurent leurs moutons tues par le loup et souvent par des chiens errants qui en meute ont aucune structure contrairement au loup, Ne les plrurent pas lorsqu’ils
les envoient aux abattoirs…Le loup fait partie de notre environnement et il a sa place tout comme l’homme sur cette terre..

Philippe Foulon
3 années il y a

Les troupeaux importants en montagne datent de 1967 à titre expérimental car il y avait pénurie de bergers et le gardiennage coûtait cher.1er point.donc les troupeaux à l ancienne n existent plus.place au business des gros éleveurs de Provence qui sont connus par ailleurs.ici il n y a pas d amour pour les bêtes….voir le transport….m abattage….les velages intensifs pour satisfaire l aid friand d agneaux….la je ne vois pas d éleveurs pleurer!!!!face à tant de souffrance animale…2eme point.ensuite le loup est protégé par l Europe,il a toute sa place dans nos montagnes et est légitime dans notre environnement quoiqu’ il en coûte.je m associe aux loups face au tandem éleveurs.chasseurs qui se comportent en assassins de la bio diversité,sans etats d âme. Tuer ou faire du fric sont leur motivations.3eme point.par contre aidons les bergers prêts à cohabiter avec le loup….il y en a…et ils sont menacés.ceux la sont proches de leur bêtes et de la nature.le principal prédateur dur cette planète c est l homme!!!!

David
3 années il y a

Bel article!
Il faut continuer dans ce sens.
Multiplier les manifestations et autre démonstrations.
C’est comme ca que les choses avanceront.

Pourquoi créer une pétition ?

Il est important et nécessaire que les opinions et valeurs des citoyens soient prises en compte en permanence et pas uniquement au moment des échéances électorales.

Une pétition est un moyen d’action efficace, pour que les citoyens reprennent le pouvoir sur les combats qui leur semblent justes.

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